Nous fêtons aujourd'hui le centenaire de la première du Château de Barbe-Bleue, l’unique opéra de Béla Bartók qui fut créé à Budapest le 24 mai 1918.
La rencontre avec la musique de Bartók fut décisive pour Endre Rozsda. Dans un entretien daté de 1987, Rozsda évoque en ces termes cette influence déterminante : « Juste un an avant mon départ pour Paris, j’ai rencontré par pur hasard un couple d’amis peintres : Imre Ámos et Margit Anna. Je n’avais rien prévu de particulier ce soir-là. Ils m’ont alors invité à un concert à l’Académie de musique. Bartók va jouer ce soir, m’ont-ils dit. Bartók n’était rien d’autre qu’un nom pour moi. Je ne le connaissais pas. […] Puis Bartók a interprété avec sa femme une œuvre personnelle : Sonate pour deux pianos et percussion, qui est à mon avis l’une des œuvres les plus importantes du XXe siècle. C’était la première mondiale. Je m’étais assis à un endroit d’où je pouvais voir les mains de Bartók. J’étais ébloui. Je n’avais jamais pensé à ce que la musique aurait pu être au-delà de Bach, de Mozart, au-delà de Moussorgski. J’étais absolument ivre de cette musique. [...] J’ai compris à ce moment-là que je n’étais pas le contemporain de moi-même. »
Rozsda aimait passionnément Le Château de Barbe-Bleue et consacra un tableau à cet opéra afin d’évoquer le monde mystérieux de la composition de Bartók. Dépassant la distinction abstraction-figuration, sa technique surréaliste lui a permis dans cette œuvre d'ouvrir les portes de l’âme, d’explorer les innombrables recoins du château de notre mémoire, et de nous présenter les secrets dissimulés au creux des salles cachées au plus profond de nous-mêmes.
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